Flamme

souscription

Déclarer sa flamme au bateau ? La bonne blague, on n’est pas Rimbaud !

(Loulou ROBERT & Erwan LARHER)

De Palos à Charleville-Mézières, de Cipango à Moguer, il se murmure que voguerait en Touraine un vaisseau fort peu fantôme, un navire plus Copains d’abord que Bounty. Un bateau duquel on ne jette personne par-dessus bord, fût-il Peau-Rouge criard. Un bateau sur lequel il n’y a que des capitaines, que des moussaillons – donc ni capitaine ni moussaillons. Un bateau sur lequel tout le monde peut tenir la barre et tout le monde a droit à la même ration de rhum, que les tonneaux soient emplis à ras bord ou sonnent creux. Un bateau sur lequel on ne se mutine pas, car cela reviendrait à se pendre soi-même à la grand-vergue.

Dans les clapotements furieux des marées, ça tangue pour tout le monde. Sous les cieux crevant en éclairs, les trombes saucent tout le monde. Mais chacun profite également des aubes exaltées, des rutilements du jour. Parce qu’à bord de ce bateau, allégorie peut-être d’une société idéale, l’équipage se frotte au collégial et à l’humaine altérité comme on frotte une lampe pour en libérer le bon génie. Les marins s’essaient, paraît-il, à l’acratie, avec ce que cela implique de discussions, débats, engueulades, écoute, bienveillance, respect. Compromis. Après quoi on trinque et ensemble on dessine d’incroyables Florides sur d’imaginaires cartes marines.

De la différence acceptée, de la curiosité partagée, de la créativité individuelle au service de l’œuvre collective naissent des azurs verts, des neiges éblouies, fleurs aux yeux de panthère, cieux de braise, étoiles nouvelles montées du fond de l’océan. Et les dieux savent combien les humains ont besoin de ces mirages dorés, de ces archipels sidéraux – d’art et de culture, pour le dire autrement.

Alors merci cher Bateau de ne point être sobre, car tes ivresses sont des richesses.